La conversation

En France, souvent on saute les civilités et les banalités. C’est à moi de m’insérer dans la conversation et les gens autour de moi ne vont pas prétendre s’intéresser en moi. Lasmall talk“, aux États-Unis, est par contre, un mécanisme d’inclusion, mais surtout une façon de penser aux États-Unis. La pretense d’intérêt est fondamentale dans les conversations quotidiennes avec des connaissances aux États-Unis – on demande comment vas-tu mais on continue son chemin avant avoir fini la question (ceci est peut-être l’observation la plus fréquente des étudiants internationaux à Carlisle).

Même s’il m’a pris du temps de m’adapter à la façon de conversation à l’américaine, je vois que je me suis habitué à beaucoup de ces normes. Je me vois interpréter le visible manque d’intérêt vers un inconnu comme une exclusivité. en même temps, en demandant des Français présents, je vois que personne n’a cette même impression. “Where are you from, what do you do, how was your day” sont des questions souvent rencontrées dans des conversations quotidiennes aux États-Unis — même si souvent on n’a pas vraiment d’intérêt de connaître leur réponse (et encore souvent on n’écoute même pas la réponse). Ici, on s’occupe plus de ce qu’un individu a à dire. S’il n’y a rien – tant pis pour lui, il ne va pas faire partie de la conversation. Même si cela présente des difficultés pour certaines personnes où des interprétations plutôt négatifs, je trouve que les pratiques françaises de communiquer rendent les conversations plus intéressantes et moins banales. (ceci est une partie de l’évaluation, encore une fois, la structure DIE sert à séparer ces aspects, un entraînement intéressant à mon sens. Toutefois, on retrouve également votre point de vue en bas de page).

Les Français savent aussi comment préserver cette pratique. C’est sur qu’on a tous des émotions et quand on parle des idées, de la politique, ou de la vie sociale, il est plus facile de se fâcher que si on parle d’où on vient et ce qu’on fait dans la vie.  La polarisation est une des plus grands obstacles sociaux et politiques aux États-Unis en ce moment et cela est dû, à côté de beaucoup d’autres choses, à une incapacité de converser avec des gens avec lesquels on n’est pas d’accord. Donc, on cache souvent ses idées et ses positions et on recourt aux sujets faciles. En France, comme dit le dicton, le désaccord est un sport national.

Je partage des points de vue très similaires à ceux de mes hôtes et, pour le meilleur ou pour le pire, je n’ai jamais eu de désaccord sérieux avec eux. Mais j’ai rencontré beaucoup d’autres personnes en France qui sont différentes de moi et avec qui nos désaccords sont plus évidents. Je me souviens d’une occasion au cours de laquelle je dînais avec un groupe de personnes (que je ne vais pas identifier), dont deux invités. Tandis que nous parlions et que notre conversation se tournait vers les gens dans la rue, les familles immigrées à Toulouse, les Roms, j’ai commencé à sentir que la façon dont les invités parlaient de ces sujets – des subtilités dans leur phrasé – révélait une conception divergente en ce qui concerne certaines idées que je considère importantes. Normalement, je n’exprime pas mon opinion assez souvent en français qu’en anglais, mais j’ai décidé de le faire. Pour moi, dès mon paradigme américain, ce simple désaccord était une confrontation avec des gens considérablement plus vieux que moi. J’ai essayé d’exprimer mon point de vue sur l’importance d’humaniser notre discours sur certains sujets en gardant à l’esprit l’impact qu’un simple phrasé peut avoir sur les points de vue que nous formons. La conversation m’affectait et je réagissais. Quant à la fois, l’un des invités a mentionné quelque chose le long des lignes des homosexuels ayant une sexualité très excitée, j’ai ri à l’intérieur et ma façade de respect a chuté. Je regrette toujours de ne pas avoir pris sa main dans ma main et lui avoir dit gentiment, “Мadame, je peux vous assurer que je n’ai pas une sexualité excitée.”Bravo, Alexander. Une réponse totalement plausible vu le contexte…Ce sera pour la prochaine fois!

Le repas, cependant, a continué toujours sans heurts. J’ai apprécié nos conversations suivantes et tout le monde était souriant à la fin du repas lorsque nous nous sommes dit au revoir de manière sincèrement (j’espère) et agréable. J’ai réalisé, quelque temps après le repas, à quel point nos petits désaccords nous concernaient dans leur ensemble. C’est à cause d’eux, pas malgré eux, que nous avons bien mangé. Je me suis réprimandé pour la manière conflictuelle avec laquelle je considérais parfois la conversation, reconnaissant que mon attitude était malsaine pour une bonne conversation – tant au sens quotidien que dans le sens d’un discours politique productif. Et j’ai réalisé à quel point j’ai été affecté par les pratiques de conversation aux États-Unis.

Note avant la correction : 16



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