Par Christina Socci
Il est impossible de parler des desserts français sans une référence à Marcel Proust. Même la pensée de notre visite à l’usine des calissons à Aix-en-Provence me rappelle les madeleines et les souvenirs. Pour résumer cette section révolutionnaire et rarement ponctuée de son chef-d’œuvre, A la Recherche du Temps Perdu, Proust a découvert le lien entre les expériences quotidiennes et la mémoire après avoir pris une bouchée d’une madeleine trempée dans du thé. Il s’est inspiré de ce moment célèbre pour s’interroger sur la raison pour laquelle le passé est caché dans les choses les plus innocentes, attendant de surgir, spontanément, de l’odeur de l’océan ou du petit morceau d’une mélodie oubliée.
Bien sûr, c’est Proust qui l’explique le mieux : « Mais, quand d’un passé ancien rien ne subsiste, après la mort des êtres, après la destruction des choses seules, plus frêles mais plus vivaces, plus immatérielles, plus persistantes, plus fidèles, l’odeur et la saveur restent encore longtemps, comme des âmes, à se rappeler, à attendre, à espérer, sur la ruine de tout le reste, à porter sans fléchir, sur leur gouttelette presque impalpable, l’édifice immense du souvenir ».
Je tiens à considérer ces petites, fortes miettes de détritus sensoriels que nous trouvons chaque jour comme des visiteurs imprévus pourtant bienvenus, des rois mages si vous me permettez, qui apportent les cadeaux des souvenirs. En dépit du temps qui est passé, le bruit produit quand quelqu’un mélange des cartes me fait penser aux jeux de « Bataille » avec mon arrière-grand-mère. L’odeur du basilic frais me ramène chez moi pendant les dimanches près-midis du passés à regarder mon père faire des boulettes de viande et de la sauce tomate. A partir de maintenant, le goût des calissons me rappellera la magie de la Provence et de mon séjour d’études dans l’ensemble. Proust peut garder ses madeleines— passez-moi un autre calisson, s’il vous plaît.