Le fait qu’un système ferroviaire national n’existe pas aujourd’hui aux Etats-Unis est une triste réalité. Ce n’est pas le cas d’autres pays autour du globe comme par exemple le Japon, la Suisse, la Corée du Sud ou encore la France. C’est ce dernier cas que nous allons développer ici. Ces différences remontent à la conception même des différents systèmes de chemins de fer. Les trains sont apparus aux Etats-Unis dans un contexte économique et commercial, afin de connecter fermes, champs, fleuves, ports maritimes entre eux dans le but de faciliter le commerce et les échanges économiques. Les trains ont donc été construits rapidement, pendant la révolution industrielle, et avec la seule intention de faire du profit. Un exemple de la manière dont les lignes de trains ont joué un rôle crucial dans la formation des États Unis est que dans le Midwest, plus de 80% des fermes se trouvent à moins de 10 kilomètres d’une station de train exportant céréales ou bétail. Les lignes ferroviaires en France, par contre, ont été construites avec d’autres intentions. Plus que les bénéfices commerciaux, c’est l’affirmation politique et culturelle de Paris en tant que capitale qui a été visée à travers l’établissement des lignes ferroviaires, comme en témoigne la structure centralisée (en étoile) du réseau ferroviaire autour de la capitale française.

Cette différence de mentalité a un impact clair sur la façon dont les grandes villes de chaque pays sont formées et montre ce qu’elles priorisent. Par exemple, Houston au Texas figure parmi les villes les moins accessibles à pied aux États-Unis. Un trajet de 5 minutes en voiture peut rapidement devenir une excursion de 45 minutes à pied du fait du manque de passages piétons et du nombre de routes très fréquentées traversant la ville. Heureusement, certaines villes comme New York sont bien plus accessibles à pied et les transports en commun y sont très usités. Même si certaines villes américaines sont techniquement accessibles à pied, c’est incomparable aux villes françaises et aux moyens dont elles sont connectées. De nombreuses grandes villes américaines sont construites de manière quadrillée, en grille, mettant en évidence l’époque à laquelle elles ont été construites et à quoi elles servaient : ce sont des villes de construction récente et axées sur la commodité, la praticité (notamment concernant la circulation automobile). Même les petites villes sont généralement construites avec une rue principale autour de laquelle tous les bâtiments sont disposés. Ceci est en opposition totale avec les villes françaises qui ont été construites maison par maison selon ce qui était pratique pour les habitants de l’époque, souvent il y a plusieurs siècles. Ceci est vrai pour des villes comme Paris, construites en spirale, mais aussi pour de petites villes comme Conques, qui ont été construites par des maçons au fil du temps à des fins de pèlerinage, menant à des dispositions en apparence aléatoires des maisons. L’architecture des villes de ces pays commence à expliquer la différence de mentalités : la culture versus la commodité à la racine de chaque système. 

Les lignes de train en Europe ne se limitent pas à la France. En effet, des systèmes ferroviaires sont en place pour relier toute l’Europe. Il y a à peine deux semaines, mon cousin, qui fait ses études à Londres, a pris l’Eurostar à Paris pour rendre visite à sa mère et a ensuite pris un train SNCF jusqu’à Toulouse pour venir me voir. Un de mes amis a pris un train pour aller à Barcelone pour le week-end. Ce ne sont que quelques exemples de la façon dont les gens que je connais ont utilisé le système de train en Europe. En revanche, se rendre de New York à n’importe où aux Etats-Unis en dehors de la côte Nord-Est est incroyablement difficile, voire tout simplement impossible.

Cet aspect culturel des objectifs du système des trains met en évidence les différences entre les systèmes de transport américains et français. Un autre aspect important à prendre en considération lors de la comparaison des deux systèmes est qu’aux États-Unis, les lignes de chemin de fer ont aidé à mettre en place les bases de l’aménagement du pays, alors qu’en France, les villes étaient déjà en place et les lignes des trains ont dû être établies sur une base déjà définie.

? Systèmes de transports : des points de vue différents

Lorsque l’on regarde les grands systèmes de transport en commun de villes en France et aux États-Unis, on remarque non seulement que ces différences sont nombreuses, mais aussi qu’elles découlent du mode de pensée de chacun de ces systèmes, système américain, système français. 

La première grande différence entre les systèmes de transport en commun français et américain est l’utilisation de ces systèmes. Les transports en commun français sont utilisés beaucoup plus fréquemment qu’aux États-Unis. Quand on regarde les chiffres, presque 14 % des Français utilisent le système de transport en commun fréquemment, contre seulement 5% des Américains. Ceci étant dit, il existe de grandes disparités : si on observe certaines villes américaines avec des systèmes de transport en commun plus développés, comme New York, le nombre de personnes utilisant les transports en commun rivalise avec et même dépasse celui de certaines grandes villes françaises.

Une deuxième différence importante entre ces systèmes est le niveau de priorité donné aux transports en commun. Le gouvernement français considère qu’un tramway est plus utile qu’une rue, parce qu’un tramway peut servir à beaucoup plus de personnes qu’une voiture individuelle. Ainsi, la priorité donnée aux transports en commun en France est illustrée par le fait que les villes françaises ont tendance à mettre des tramways dans les grandes rues. Cela  souligne le fait que les transports en commun et les piétons sont prioritaires en France, pas les voitures. La France a de nombreux endroits réservés aux piétons (aires piétonnes) et où les voitures sont interdites.

Un autre aspect du système de transport en commun français qui n’est pas encore arrivé aux États-Unis est la présence d’un TGV, ou train à grande vitesse. Le TGV est présent dans toute la France, ainsi que dans de nombreux autres pays européens, et les Européens utilisent régulièrement ce train à la place d’un avion. L’interdiction des vols (en avion) quand il existe une alternative en train de moins de 2h30 vient d’ailleurs juste d’être validée par la Commission européenne, pour des raisons écologiques, afin de privilégier les déplacements en train lorsque cela est possible. Les États-Unis n’ont pas encore ajouté cet aspect du transport en commun, les américains voyageant à travers le pays principalement en avion ou en voiture. La Californie a prévu de construire le premier TGV aux États-Unis, mais les opérations ne commenceront qu’en 2030.

En comparant ces deux systèmes, il semble que la principale cause de ces différences soit la taille des pays. Les États-Unis font environ 17 fois la taille de la France. Par conséquent, dans le développement du système de transport aux États-Unis, il était nécessaire que cette vaste région soit totalement connectée, et au vu des distances à parcourir, il fallait des solutions de transport rapides. Cela pose un problème évident pour le développement des transports en commun (trains, bus, tramways…), surtout à l’échelle nationale, puisqu’il y a beaucoup plus de villes éloignées à connecter entre elles aux Etats-Unis qu’en France. 

Les États-Unis sont donc un pays beaucoup plus grand, mais aussi moins centralisé que la France, aux échelles nationale et internationale. La capitale française, Paris, concentre les lieux de pouvoir (économiquement et politiquement parlant notamment) et de décision: on parle de macrocéphalie. Donc, la France a la capacité de connecter toutes les grandes villes à la capitale. Aux États-Unis, la capitale est Washington DC, et la ville la plus métropolitaine est New York. Non seulement les lieux de pouvoir économique et politique sont donc dissociés, mais en plus, ces deux grandes villes sont sur la côte Est du pays, donc elles sont complètement déconnectées de l’autre côté du pays. Malgré ces différences fondamentales dans la structure du pays, les États-Unis continuent de développer de nouveaux systèmes de transport en commun dans les grandes villes. 

En général, les transports sont très différents dans ces deux pays, et cela crée des différences fondamentales dans la vie quotidienne des citoyens. Le résultat de tous ces facteurs est la présence d’une grande différence dans la relation que les individus ont avec leurs voitures. Aux États-Unis, les voitures ne sont pas considérées comme un choix, elles sont une nécessité. Pour les étudiants américains, fêter ses seize ans est une étape importante: la possibilité de passer son permis de conduire signifie que les jeunes n’ont plus besoin d’être véhiculés à l’école et à leurs activités extra-scolaires par des proches. Ils peuvent conduire eux-mêmes. C’est une grande étape dans la prise d’indépendance d’un étudiant américain. En comparaison, les étudiants français peuvent aller à l’école, au travail, et pratiquer leurs loisirs seuls avant leurs seize ans grâce au système de transport en commun très développé dans les villes. 

Les systèmes de transports français et américain ont une histoire très différente, ce à quoi on peut ajouter un système contemporain de transport très différent également. Ces différences entre les systèmes de transport ont un effet non seulement sur la vie quotidienne des citoyens, mais aussi sur leur relation à leur environnement.

? Explorer son environnement à un autre rythme : une façon d’améliorer sa santé mentale

Non seulement le modèle français favorisant les piétons et leurs déplacements en transports en commun rend la vie plus pratique pour le citoyen lambda moyen, qui utilise les transports en commun comme principal moyen de se déplacer dans la ville, mais ce modèle a aussi d’autres effets positifs, à savoir une meilleure appréciation de la ville pour les habitants d’un Toulouse citoyen et facilement navigable. Les possibilités de stationnement limitées dans le centre-ville animé et pittoresque encouragent les individus à privilégier les déplacements non-automobiles, font qu’il devient effectivement essentiel d’explorer la ville rose à pied ou en utilisant le système de transport en commun efficace.

Ces attributs peuvent également avoir un effet très positif sur la santé mentale des personnes qui vivent à et visitent Toulouse. En effet, la structure non quadrillée de Toulouse signifie qu’il est très simple et nécessaire de sortir à pied et de prendre l’air pour se rendre là où on veut aller. De nombreuses études prouvent que ces déplacements sont bons pour la santé mentale, particulièrement à notre époque où nous avons été freinés par le COVID-19 et ses restrictions, certes nécessaires, mais dures. Il a été prouvé que le fait d’être à l’extérieur atténue les symptômes d’anxiété et de dépression, tout en stimulant la clarté mentale, la productivité et la créativité, alors que dans certaines villes (comme New York ou Los Angeles) le bruit et la circulation peuvent créer beaucoup de stress. La pratique toulousaine de faire la part belle aux piétons facilite grandement les choses, en prenant des mesures comme la mise en place de barrières ou de plots anti-stationnement pour que les voitures ne puissent pas traverser les zones piétonnes. Le centre-ville toulousain est ainsi largement piétonnisé.

Un autre aspect important qui fait de Toulouse un endroit agréable pour les individus sans avoir besoin de s’appuyer sur les voitures est la présence incontournable d’espaces publics qui proposent souvent des divertissements gratuits aux touristes et aux habitants. L’espace qui a tendance à être le plus médiatisé est la place du Capitole, où les gens peuvent profiter d’une grande diversité d’événements avec en toile de fond le magnifique bâtiment du Capitole. Pendant notre séjour ici, dans l’espace de quelques mois, il y a eu un concours de saut à la perche, une dégustation de vin, un festival de la durabilité, un vaste marché de Noël et des marchés hebdomadaires qui offrent aux personnes une chance d’explorer gratuitement la culture locale et la vivacité de la ville. D’après mon expérience personnelle et celle de mes amies, aucune voiture n’est nécessaire pour profiter de ces événements, il suffit d’emprunter le système de transport en commun très efficace, avec notamment trente-huit stations de métro espacées d’environ 10 minutes les unes des autres, ou de faire une promenade avec vue sur la ville, selon la proximité. Les dimanches sont particulièrement appréciés des Toulousains, car le rythme ralentit et on peut prendre plus son temps pour traverser cette belle ville, se balader sans destination précise. Avec des dizaines de marchés ouverts exclusivement le dimanche, il est facile pour les gens d’interagir avec les propriétaires de petites entreprises locales tout en soutenant stimulant l’économie locale, et tout cela sans voyager trop loin ou devoir compter sur des voitures ou des réseaux routiers trop compliqués.

Le mot de la fin

La France possède certaines des villes les plus propices à la marche au monde, et par conséquent, les Toulousains sont parmi les plus heureux et ont le sentiment d’avoir une qualité de vie globale très satisfaisante. Les recherches montrent que les personnes vivant dans des villes non piétonnes avec un volume élevé d’autoroutes et d’autoroutes ne ressentent pas la même chose et se sentent plus déprimées que celles vivant dans des villes où les voitures ne sont pas privilégiées, au profit des piétons et des transports en commun. Comme nous pouvons le constater à partir de ce simple seul fait, il est de la plus haute importance de privilégier un système de transport en commun efficace et piétonnier, comme c’est le cas à Toulouse. Il est impératif que les États-Unis commencent à mettre en œuvre des systèmes comme celui de Toulouse dans ses villes les moins accessibles à pied.