Article rédigé par Julia Walsh

Il existe chez les étudiants américains qui viennent étudier en Europe le rêve futile de décorer leur passeport avec les tampons de différents pays afin de se mettre en avant et pouvoir raconter leurs nombreux voyages et aventures de mobilité. Pour arriver à Toulouse, j’ai eu une correspondance à Bruxelles. Là-bas, j’ai reçu mon premier, et très anticipé, tampon dans mon passeport. Cependant, quand j’ai atterri à Toulouse, je n’en ai pas reçu. La même chose est arrivée quand j’ai voyagé en Italie et en Espagne, de nouveaux pays, mais pas de nouveaux tampons. En fait, j’ai même eu l’impression que les agents de l’aéroport ont à peine regardé mon passeport. C’était choquant venant des États-Unis où entrer et quitter le pays est obligatoirement accompagné d’une inspection minutieuse du passeport. Cette expérience de mon premier jour de mobilité m’a donné un aperçu des différences de sécurité frontalière entre la France et les États-Unis.

L’Accord et l’espace Schengen

Un autre moment où j’ai vu très clairement les différences entre les politiques aux frontières de mon pays d’origine et la France était quand mes hôtes et moi avons passé la frontière entre la France et l’Espagne. Nous passions le week-end dans les Pyrénées, une chaîne de montagnes qui s’étend du sud de la France au nord de l’Espagne. Mes hôtes m’ont informé que nous étions très proches de la frontière espagnole et que nous pouvions la traverser si je le souhaitais. Ma réaction initiale était de paniquer parce que je n’avais pas mon passeport avec moi. Cependant, j’ai réalisé que traverser la frontière était sans incidence, la seule différence notable étant les signalisations en espagnol. Ici, l’acte de traverser une frontière internationale, qui m’apparaît comme quelque chose d’important, n’avait rien de différent d’un voyage entre l’État de New York et la Pennsylvanie, ou tout autre État américain.

Mes hôtes m’ont expliqué qu’il s’agit du résultat de l’Accord de Schengen. Après quelques recherches, j’ai appris que l’Accord de Schengen de 1995 a suivi le Traité de Maastricht de 1992. Le traité fondateur de l’Union Européenne a été créé pour encourager l’intégration et le sens de la communauté entre les États européens. Depuis 1995, l’espace Schengen s’est élargi et inclut désormais 26 pays entre lesquels il est possible de voyager librement, sans passeport individuel. Par conséquent, quand on voyage en voiture ou avion vers tous les pays frontaliers de la France, il existe une liberté de mouvement et pas de contrôles douaniers.

La sécurité aux frontières aux États-Unis et en France

Les frontières matérielles de sécurité que l’on peut voir aux frontières en France et aux États-Unis sont différentes. Comme je l’ai vu quand j’ai passé la frontière espagnole, il n y a pas de douanes ou de point de contrôle auquel s’arrêter entre les deux pays. J’ai vu ce qu’il reste des anciens postes frontières mais ces bâtiments sont abandonnés depuis l’accord de 1995. Bien que je n’ai pas l’expérience d’avoir traversé la frontière sud des États-Unis en voiture, j’ai déjà traversé la frontière nord vers le Canada plusieurs fois. Ce voyage, même s’il n’est pas trop difficile pour les citoyens américains, peut prendre plusieurs heures car chaque véhicule doit faire la queue et est arrêté et questionné avant d’entrer dans le nouveau pays. Je me souviens avoir passé cette frontière avec mes parents quand j’étais petite, et ils m’avaient dit que traverser la frontière est quelque chose de très sérieux et qu’il est impératif de ne pas parler sauf quand on s’adresse à nous. J’ai gardé cette même impression sur les frontières dans chaque nouveau pays où je vais. Cependant, en arrivant en France et voyageant dans l’Union Européen, j’ai trouvé qu’il n’y a pas ce même sentiment au sein de l’espace Schengen. Il est important de spécifier la différence entre l’Union Européenne et l’espace Schengen, du fait des différentes procédures de sécurité quand on voyage à l’extérieur de l’espace Schengen. En novembre, j’ai voyagé à Dublin le temps d’un weekend et j’ai été ramenée à la réalité à laquelle j’ai l’habitude de faire face avec les douanes à l’aéroport. Les agents ont examiné mon passeport avec attention et posé des questions sur mon voyage, à la fois que je suis arrivée en Irlande et quand je suis retournée en France. C’est à cette occasion que j’ai enfin reçu un nouveau tampon sur mon passeport. Pour autant, ce nouveau tampon était au prix d’une expérience de contrôle à la frontière plus intense et stressante. Il est clair qu’il n’y a pas de procédure de sécurité uniforme dans l’Union Européen, malgré les efforts de l’Accord de Schengen. Ce constat mis à part, la sécurité aux frontières au sein de l’UE, et par conséquent en France, est tout de même très différente des protocoles de sécurité aux États-Unis.

Impacts de l’actualité sur la sécurité des frontières

Aujourd’hui aux États-Unis, mais aussi en France et plus largement en Europe, les débats politiques autour de la question des frontières sont nombreux. En Europe, cette conversation porte principalement sur l’afflux de demandeurs d’asile et de migrants qui arrivent dans la région depuis 2015. La “crise des migrants” a ouvert de nombreuses discussions sur la manière dont l’Union européenne et les États membres allaient gérer de manière adéquate le logement des demandeurs d’asile. Pour la France et d’autres pays, ces conversations incluent la possibilité de mettre en place des quotas et de limiter le nombre de personnes autorisées à entrer dans le pays, tout en respectant leurs valeurs et les droits de l’homme et du citoyen. Aux États-Unis, les conversations sur la sécurité aux frontières se centrent principalement sur les problèmes à la frontière avec le Mexique. Avec la répression décidée par l’administration Trump en matière de sécurité des frontières, la région est en proie à de fortes tensions et est un important sujet de débat à l’approche des élections présidentielles de 2020. Ce seul sujet est extrêmement polarisant pour les Américains, certains espérant stopper le flux d’immigration illégale et d’autres cherchant à apporter l’asile à ceux qui se trouvent à la frontière et à aider les familles détenues par les services d’immigration et des douanes. Les discussions les plus pressantes sur la sécurité des frontières, tant aux États-Unis qu’en France, se centrent donc sur le lien entre citoyenneté et migration. Les droits des citoyens et des immigrants sont différents dans les deux pays et reflètent à la fois des différences et similitudes culturelles plus larges dans la recherche constante de définition du citoyen.